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CosmoZ (mercredi, 15 septembre 2010)

9782742793198.jpgCeux qui lisent ce blog avec régularité savent que les notes de lecture y sont rares. J’ai choisi de plutôt mettre le petit extrait de texte qui donne envie, c’est tout de même l’écriture de l’auteur qui prime plutôt que les longs discours. Mais parfois, le livre est rétif, il ne se plie pas aisément à l’extraction, on se dit alors qu’un seul morceau aussi bien choisi soit-il ne suffira pas, sans doute à tort. C’est pourquoi je prends le risque d’être le énième, de rabâcher, et je me lance dans le cyclone CosmoZ, un des livres qui m’a raconté le plus de choses en cette rentrée. Un évènement à mon sens.

D’emblée je le cale près de deux autres, dont il est parfois très proche – et cependant très éloigné –, que sont le Siècle des nuages de Philippe Forest (Gallimard) et Éclairs de Jean Échenoz (Minuit). Ces trois livres, chacun à sa manière, nous parlent du siècle passé, nous donnent des points de vue, ce qui n’est pas si courant (sans jeu de mot).

D’entrée j’y ai entendu (cf. le post du 13 septembre), les Hommes creux de Thomas Stearns Eliot et, au fur et à mesure de l’avancée de ma lecture, j’ai vérifié ce son comme si j’étais l’homme en fer blanc, comme si la voix d’Eliot passait par là, que je la captais avec de plus en plus  d’ampleur. Mais c’est la voix de Claro qui résonne, qui vibrionne , qui remue, brutalise parfois, malaxe… Dès lors, pris dans le tourbillon de cette langue en mouvement qui brasse large et construit par strates, le livre s’ouvre sur Dorothy, que nous connaissons tous à priori, puis va de l’ablation d’une tumeur de la langue de Franck Baum, au XIXe siècle, à un certain jour de 1956 devant un poste de télévision CT-100 où passe le Magicien d’Oz de Victor Fleming . Car de la fiction de Baum à celle de Claro les personnages se modifient et font même des incursions dans l’Histoire, traversent le siècle, ses soubresauts, ses drames, ses horreurs.

La violence des tranchées, les camps, la bombe atomique nous entrainent de trou noir en trou noir vers – dans – le magma du CosmoZ et la multiplicité des approches ne rend que plus dense, plus singulière, la façon de tracer le sillon du récit comme nous le propose Claro. Guère d’équivalences me semble t’il. Tant mieux.

CosmoZ vous attrape et ne vous lâche plus, c’est un monde vaste, plus vaste que le monde, un ultramonde et un inframonde : un métamonde, une féerie qui démantibule la féerie, en fait autre chose, une impossibilité à choisir entre fiction et réalité pour mieux se glisser dans chaque possible de chaque personnage et du personnage que devient le texte, le corps du texte emplissant ceux qui sont creux, les freaks, les inadaptés, les réfractaires, repoussant les manigances des magiciens et autres manipulateurs.

 

Claro

CosmoZ

14,5x24 ; 488 p. ; 22,80 €

Actes Sud, 2010

 

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