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Jean Grosjean, « Apocalypse » (lundi, 31 juillet 2017)

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« Avec quel puéril sérieux les mouches s’entêtent à nous aimer les mains ! Un souffle dans l’herbe émeut des lames courbes, des bannières blanches et des chapeaux à graines.

 

Chaque arbre hoche la tête à son tour, hausse l’épaule. L’hirondelle à gorge de veilleuse glisse sur les rails de l’air. Oh ! quand elle vire, la lueur marine de son dos.

 

Un bourdon s’affaire à ce bruit d’usine qu’il mène entre les iris jusque, silence ! son tête-à-tête dans l’abside avec le dieu suc. Au loin s’égosille un coq.

 

Le ciel du dimanche perché sur la colline, les friches lui tiennent tête de leurs dards et de leurs torches, sainte ferveur du schisme dont nos douleurs ne furent que l’ombre.

 

Les laboureurs ont quitté l’entrain ouvrable, et les mineurs les houilleux Érèbe. Ils errent en veste entre les fermes avec des fragments de phrases. Fermons les yeux pour qu’au fond des bois le coucou faiblement coucoule.

 

La flamme bleue du jour fuit lente avec de brèves braises de couchant à sa pointe. La face creuse du ciel se retire en soi sans détourner de moi ses yeux de cendre.

 

Les ténèbres n’osent encore leur faction hérissée de lances ni furtif l’amour planter le maigre mai dont rougisse une servante à l’aube.

 

Un arbre que l’hiver visitait de plaintes, déploie dans la fosse d’en haut son envergure. Son feuillage profère à voix basse cette mort que notre mort désire. »

 

Jean Grosjean

« La Vehme à l’œuvre » in Apocalypse

Gallimard, 1962

Repris in La Gloire, précédé de Apocalypse, Hiver et Élégies

Préface de Pierre Oster

Poésie/Gallimard, 2008

12:37 | Lien permanent | Tags : jean grosjean, apocalypse, poésiegallimard