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Henri Cole, « Le merle, le loup suivi de Toucher » (mardi, 08 septembre 2015)

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 chenin blanc

 

« Hé, humain, mon cœur a mal »,

proteste un corbeau, tandis que sur mon balcon

je lis et bois du chenin blanc. Son copain

goûte un rongeur flasque et semble

vouloir dire quelque chose, levant un pied jaune

agressif, une sorte d’homoncule :

« Ce que tu désires, désire-le pour toi-même »,

claque-t-il du bec, citant Rumi, franchement déçu,

mais visionnaire en un sens, comme si son esprit de corbeau

devinait mon Enfer personnel. Cependant, mes mains

en me frottant le cou ont l’intensité

de la caresse d’une mère, alors je lance,

plaidant pour l’humain : « Parlons-en, corbeau,

Dieu n’a-t-il pas fait la chair sensible à ça ? »

 

&


patchwork

 

De petits sacs de tabac à chiquer en mousseline,

teints à la maison en rose et jaune, assemblés en zigzag —

un gai recyclage de tissus qu’on voit souvent dans le Sud —

solidement cousus, une alternance de couleurs,

comme, enroulée autour de moi, une feuille de température.

Quelle est la température d’Henri, le mouton noir,

arrivant sans crier gare avec un nouvel amant — alcoolique

et impétueux —, provoquant dans le reste de la famille

des accès de pitié, de ressentiment et de stupeur à demi

admirative devant son toupet ? Navré d’avoir brisé

le vase Ming et mis le feu à la barbe du Paternel.

Je pourrais en fait être normal si l’imagination

(instable, inquiétante, fragile) est le Père qui pénètre

la Mère, et ceci mon poème-Enfant. »

 

Henri Cole

Le merle, le loup suivi de Toucher

Traduit de l’anglais (États Unis) et présenté par Claire Malroux

Le Bruit du temps, 2015

18:39 | Lien permanent | Tags : henri cole, le merle, le loup suivi de toucher, claire malroux, le bruit du temps