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le loup suivi de toucher

  • Henri Cole, « Le merle, le loup suivi de Toucher »

    HenriCole.jpg

     chenin blanc

     

    « Hé, humain, mon cœur a mal »,

    proteste un corbeau, tandis que sur mon balcon

    je lis et bois du chenin blanc. Son copain

    goûte un rongeur flasque et semble

    vouloir dire quelque chose, levant un pied jaune

    agressif, une sorte d’homoncule :

    « Ce que tu désires, désire-le pour toi-même »,

    claque-t-il du bec, citant Rumi, franchement déçu,

    mais visionnaire en un sens, comme si son esprit de corbeau

    devinait mon Enfer personnel. Cependant, mes mains

    en me frottant le cou ont l’intensité

    de la caresse d’une mère, alors je lance,

    plaidant pour l’humain : « Parlons-en, corbeau,

    Dieu n’a-t-il pas fait la chair sensible à ça ? »

     

    &


    patchwork

     

    De petits sacs de tabac à chiquer en mousseline,

    teints à la maison en rose et jaune, assemblés en zigzag —

    un gai recyclage de tissus qu’on voit souvent dans le Sud —

    solidement cousus, une alternance de couleurs,

    comme, enroulée autour de moi, une feuille de température.

    Quelle est la température d’Henri, le mouton noir,

    arrivant sans crier gare avec un nouvel amant — alcoolique

    et impétueux —, provoquant dans le reste de la famille

    des accès de pitié, de ressentiment et de stupeur à demi

    admirative devant son toupet ? Navré d’avoir brisé

    le vase Ming et mis le feu à la barbe du Paternel.

    Je pourrais en fait être normal si l’imagination

    (instable, inquiétante, fragile) est le Père qui pénètre

    la Mère, et ceci mon poème-Enfant. »

     

    Henri Cole

    Le merle, le loup suivi de Toucher

    Traduit de l’anglais (États Unis) et présenté par Claire Malroux

    Le Bruit du temps, 2015