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  • Inventaire/Invention ✝

    couv_doppelt-monde.gifInventaire/Invention disparaît. C'est grave. D'autres éditeurs, diffuseurs, associations… sont dans des situations plus que précaires, intenables.

    Patrick Cahuzac s'ouvre ici sur la façon dont les pouvoirs publics résolvent les difficultés de ceux qui portent la culture dans ce pays.


    Chers amis,
    Au mois de décembre 2008 et, de nouveau, en janvier 2009, le Conseil général de Seine-Saint-Denis, notre principal partenaire depuis 10 ans, nous a refusé une subvention pour l'année 2008 et l'avance habituelle de notre subvention de fonctionnement, versée en début d'année, pour 2009. Il ne nous a pas été donné d'explication bien claire au sujet de ce désengagement brutal (d'autant plus brutal qu'une convention nous liait jusqu'en 2010).
    La gestion de l'association ne saurait être en cause puisqu'en dix ans d'existence, nous n'avons jamais été déficitaires. Il semblerait que l'explication soit à chercher du côté de « la nouvelle politique culturelle » du conseil général de Seine-Saint-Denis, mise en œuvre depuis le changement de majorité politique de cette assemblée, en mars 2008...
    Le Conseil général savait parfaitement qu'en agissant ainsi, il nous condamnait. Ce retrait brutal s'est en effet produit au pire moment de l'année, lorsque nos caisses sont vides. Il ne nous laissait aucune chance.
    Comme il n'était pas dans les intentions de nos autres partenaires (Drac et Conseil régional) de pallier au désengagement du conseil général de Seine-Saint-Denis, nous avons été contraints de nous placer en cessation de paiement. La liquidation de l'association sera probablement prononcée dans les jours prochains par le Tribunal de Grande Instance de Paris.
    Depuis les élections présidentielles de mai 2007, la vie de l'association était devenue difficile. L'État avait réduit son aide de près de 50%. Continuer n'allait pas de soi. Certains savent que je travaillais à peu près bénévolement depuis ce temps dans le but de préserver l'équilibre financier de l'association et de ne licencier personne. C'était précaire mais nous y arrivions. Les ateliers de lecture étaient conduits dans des dizaines de classe, en Seine-Saint-Denis principalement, les livres paraissaient, le site était vivant...
    Inventaire/Invention a été une aventure intellectuelle et humaine extraordinaire. Elle a été possible grâce à des hommes et des femmes qui ont aimé ce projet et qui s'y sont reconnus, s'y sont investis, y ont cru. Je les remercie tous et toutes, du fond du coeur.
    Patrick Cahuzac
    le 9 fevrier 2009


    Inventaire/Invention
    pôle [multimédia] de création littéraire
    Parc de la Villette
    211, avenue Jean-Jaurès 75019 Paris
    info@inventaire-invention.com

  • POUR JACQUELINE CAHEN


    Nous sommes des livres brefs.
    Quelques pages.
    De minuscules dos dans la très grande bibliothèque.
    Mais la voix, la langue, prennent toute la place et flottent éternellement.


    Tout poème est un silence qui n’a pas voulu devenir bavard.
    Chaque langue est un sacrifice au silence.
    Celui qui écrit se tait, ne se tait pas, jamais.
    Dans le livre, la voix est silencieuse.
    C’est de la langue qui se fige.
    Tous ceux qui écrivent, en regard de la voix, ont la gorge tranchée.


    Les enfants lisent à haute voix. Leur index suit les mots un à un.
    Parfois ils les brusquent, ils buttent, sautent, enjambent… donnent de la voix, de la gorge, de la poitrine, du ventre, sortent les mots du livre, bâtissent des arches, des ponts, des palais pour la voix, écorchent les mots, remplissent le monde de mots – C’est la langue qui entre ! C’est la langue qui sort !


    Personne ne peut voir, d’un coup, les six côtés d’un livre, ni toutes les faces d’une urne funéraire. Tous les deux contiennent de la cendre.
    Les cendres de nos livres pèsent-elles plus ou moins que nos cendres ?
    Disparu dans l’opacité du langage, nous restons clair comme le bruit de la langue.


    La langue d’un ami est le plus doux des tombeaux, on ne s’y ennuie jamais.
    Nous n’y avons plus à nous soucier de rien.
    Nous n’y avons plus rien à faire qu’à nous laisser bercer, comme dans un nid moelleux, chaud et un peu humide.
    Nous n’y souffrons plus, jamais.
    Nous y avons la liberté d’un nuage.


    Parfois le vent est lent et l’immédiat labile.

     

    (avec des mots, en italique, de Pascal Quignard, Julien Blaine

    & Jacqueline Cahen)