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Pascal Quignard

aa8a35ba92cf0e38dceda5117a67281a.jpgPascal Quignard était mercredi 6 décembre à 18h à la bibliothèque Mériadeck de Bordeaux pour présenter son livre la Nuit sexuelle – publié aux éditions Flammarion – grâce à la volonté de Sophie Chambard – que l'on me permette d'être fier – et à la complicité active d'Évelyne Rocchetto. On a refusé du monde et la salle était archi comble, le public au rendez-vous à tel point que l'on diffusait la conférence sur des écrans dans le hall de la bibliothèque.

La SS ne m'ayant pas permis d'assister à cette conférence puisque les horaires de sortie des assurés en arrêt maladie – je vais avoir un contrôle là c'est sûr – ne leur permettent pas de sortir combler leurs désirs intellectuels, mais exclusivement de pouvoir se rendre dans des grandes surfaces consommer, consommer, consommer toujours, afin de retourner le lundi suivant oublier qu'ils ont une vie et qu'ils peuvent penser, je n'y étais pas et je le regrette bien. Le tout Bordeaux non plus et c'est tant mieux. Je suis un homme en colère depuis 57 ans et ça ne s'améliore pas. Je suis toujours aussi bête également, les "gens qui savent" me le rappellent assez souvent, mais c'est comme ça et finalement, on l'aura compris j'en suis plutôt fier et j'ai beaucoup de défiance envers les "gens qui savent" – et qui aiment surtout le pouvoir (Nicolas Sarkozy aussi, ça n'a pas l'air de les gêner).

Revenons à Pascal Quignard.

J'écrivais ce matin à Isabelle Baladine Howald, poète et libraire (Kléber à Strasbourg) que je pensais qu'il était le plus grand écrivain vivant et elle en convenait. La formule "plus grand écrivain vivant" est un peu con je l'avoue. Nous entendions par là "qui construit depuis sa première ligne une œuvre qui fait sens, qui s'impose, qui crée ses lecteurs", ce n'est pas si courant. Nous en avons ajouté quelques autres que je ne citerais pas aujourd'hui.

Je ne peux rien dire sur cette conférence puisque je n'y étais pas.

Je peux juste recopier, non pas des lignes de la Nuit sexuelle – ça viendra –, mais des lignes tirées de son œuvre ancienne et toujours aussi présente à l'âme, au cœur, à la pensée et à tout le tremblement.

Donc acte : 

“Les premiers cris d’enfant lisent déjà en les criant des traces plus anciennes et terribles que les plus anciennes écritures attestées.” le Lecteur, Gallimard 1976, p. 82


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“Sans doute l’ancien français nommait-il de même “sol” le plancher, la semelle : lieu où va la plante du pied. Mais l’espace qu’occupe la plante du pied ce n’est aucune terre et ce n’est aucun sol. C’est la peau nue qui la revêt. Ou la peau écorchée qui la chausse.” Sur le défaut de terre, pointes sèches de Raoul Cordesse, Clivages, 1979, p. 55


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“Le langage teint les lèvres comme les mûres.” Sarx, pointes sèches de Gérard Titus-Carmel, Maeght, 1977, p. 51


*

 


“Un livre est assez peu de chose, et d’une réalité sans nul doute risible au regard d’un corps. Il ne se transporte au réel que sous les dimensions qui ne peuvent impressionner que les mouches, exalter quelques blattes, étonner les cirons? Parfois l’œil d’un escargot enfant.
Il introduit dans le réel une surface dont les côtés excèdent rarement 12 à 21 cm, et l’épaisseur d’un doigt.” Petit traité, tome I, éd. Clivages, 1981, p. 49


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“Par le silence du livre le monde est plongé dans un silence plus silencieux que le silence du monde.” ibid. p.59


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“Si ce n’est pas l’écrit que nous souhaitons écrire

Le sang de ce que nous éprouvons,

S’il n’épouse pas les lettres qui les nomment,
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S’il ne franchit pas nos lèvres,

(mais le mouvement agité qui l’anime. L’EFFUSION DE SANG. Lèvre blessée de ses lèvres.
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La violence terrifiée des lettres qui le nomme. Mais sans nom.
Mais le mouvement agité qui l’entraîne dans la mort.
Mais sans nom, ni intérieur à nous, ni le dehors, le sang)

Il lui manque alors une part de ce qui le dessaisit,

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Et en lui erre, dévale brusquement,
Plus qu’il ne nous accomplit, n’atteste de nous
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Ni témoigne de lui.” Sang, Orange Export Ltd, 1976, texte intégral, les lignes sont les changements de pages


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"Parler (en tant que parler parle) parle de chez ce que la langue tait.” Hiems,Orange Export Ltd, 1977, non paginé

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