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Malcolm Lowry, « Deux poèmes »

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© Júlio Pomar

 

«  Poème bizarre

 

J’ai connu un homme sans cœur :

Il dit que des enfants le lui ont arraché

Et l’ont donné à un loup affamé

Qui s’est enfui l’emportant dans sa gueule.

Et les enfants ont fui avec l’instituteur ;

L’animal aussi s’est enfui bien vite,

Et derrière lui, bizarre poursuite,

Titubait encor cet homme sans cœur.

J’ai vu cet homme l’autre jour,

Gonflé d’un orgueil ridicule,

Le cœur remis en place et la mine égayée ;

À son côté, tout radouci, trottait le loup.

 

 

Pierres blessées

 

Parfois l’enfant ne sait pas dire son chagrin,

Mais il entend, le soir, les étranges présages

Qui annoncent aux pierres blessées, à même le sol,

Leur libération, ou il apprend que les pierres

Cœurs brisés, ont parfois l’éclat dur d’un langage.

Le bruit de la mer rugit au vestiaire

— Et un reproche ; mais cela même est rassurant :

Un reproche de moins entre lui et la mort…

Et là, sur le tapis devant la cheminée,

Il regarde l’enfer et voit son avenir

— Qui sait, peut-être une chambre de chauffe ? —

Pourtant l’enfant, je pense, a connu des fous-rires

(On dit que de la vie ce sont les seuls remèdes),

Et puis, n’eût-il pas survécu,

Saurait-il que Rimbaud a connu ces chagrins,

Rimbaud dont l’âge d’homme aussi, comme le sien,

Fut déserté d’amour et privé de langage ? »

 

Malcolm Lowry

Pour l’amour de mourir

Traduit par J.-M. Lucchioni

Préface de Bernard Noël

Goauches découpées de Júlio Pomar

Coll. Le Milieu, éditions de la Différence, 1976

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