UA-62381023-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

les élégies

  • Emmanuel Hocquard, « Élégie 5 – IV »

    hocquard.jpg

    © : Claude Royet-Journoud

      

    « Pour toute chose, nous eûmes les mêmes yeux :

       le jardin d’autrefois et celui d’aujourd’hui,

       le jardin immobile.

    Nous avançâmes au milieu de ce qui porte un nom

       et que nous avions appris à nommer ;

    Nous progressâmes dans les livres

       au milieu de ce que nous apprenions,

    L’arbre vivant et l’arbre mort au même titre,

       songeant peut-être qu’une telle coïncidence

    Ne durerait pas toujours car sa croissance serait sa mort

       et la pensée du modèle sa fin.

       Notre amour n’eut pas d’autres lieux

    Qu’une succession de regards sur des lieux de fortune,

       morceaux de choix ravis aux circonstances,

    Une alternance de mémoire et d’oubli pour les choses connues  

       et puis l’indifférence aux choses sues.

     

    Le temps de l’amour fut cette suspension du temps de tous les jours,

       une brèche délibérée dans le temps des paroles.

    Et là nous ressentîmes ce que d’autres à notre place

       auraient également éprouvé,

    Un contentement certain, quoique tempéré,

       d’être parvenus là où nous étions parvenus

    Et déjà pourtant le vague désir de nous en retourner,

    Une telle coïncidence ne pouvant pas durer

       puisque sa croissance serait sans fin. »

     

    Emmanuel Hocquard

    Les élégies

    P.O.L, 1990