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  • Dominique Preschez, « Un matin, l’autre »

    Les Inédits du Malentendu, volume 3.

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                                                                                           pour Claude et Sophie Chambard

                        

    … repères     ciels en pinceaux

         d’oiseaux     sans couleur autre

    qu’infime or                   montgolfière

                                                   au levant   continues

    ses narines             au vent         caressent

                                    l’ambre des algues

                       en dépôt de la nuit

    sur toute rive ronde…

     

     

     

     

    … les bois en veille     bandent

                                   l’effigie des solistes     cotonnée

    aux pollens roulés             en tierces

                                                       cordes ou résonances

    quel orchestre ?

                                sous la hêtraie du vent...

     

    _____________________________________________________________

     

     

    … attente       à l’air sec        du parquet

                                                            disjoint le souffle étouffé

       un enfant marche sur les mains

                                              liées à la pression

                         au vide noir s’incline

                                            où trait de lune   sauve

                         l’instant du sacrifice…

     

     

     

     

     

    … dans le bas du jardin chaud

                             frisé par la fontaine

    l’arbre à glycines

                 grimpe au parquet de lune

                               un funambule étoilé

    en blanc de laine

                               il a talqué ses mains…

     

    _____________________________________________________________

     

     

    … quelle prévoyance d’ailes

                                        amantes en secret

    ô, tournis !                             sous l’ombrage

         exhalent                                      une écurie haletante

                     son musc de corne

    près   des   paupières                                      retournées…

     

     

     

     

     

    … en poussière       les silences

                             de l’air                mesurent

    l’horloge de verre       célèbre

                           seconde à la seconde

    près                                       l’illusion du temps…

     

     

     

    Dominique Preschez

    Jardin de sommeil (extrait)

  • Pascal Quignard, « Je suis simplement… extrait de L’image manquante »

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    « Je suis simplement un homme qui a beaucoup lu, un lettré ou, mieux encore, un littéraire, c’est-à-dire un homme qui apprend sans cesse à écrire ses lettres, à les déchiffrer, à les transposer, qui ne cesse de poursuivre cet apprentissage, qui aime follement lire, étudier, traduire, retraduire, écrire.

    C’est ainsi qu’il y a un apprendre qui ne rencontre jamais le connaître – et qui est infini.

    Cet infini est ma vie. »

     

    Pascal Quignard

    « L’image manquante »

    in Sur l’image qui manque à nos jours

    Arléa, 2014

  • Thomas Bernhard, « il me semble »

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    DR

     

    « Il me semble que j’étais beaucoup plus jeune

    plus jeune encore que ceux qui sont déjà morts,

    je voyais les villes et la fatigue des yeux

    était la plainte de l’été dans les ruisseaux.

     

    Plus jeune j’étais que ceux qui me blessaient souvent

    et qui ont oublié mon nom depuis longtemps

    derrière le métier à tisser, sous le marteau,

    ou dans l’abrupt sillon de la herse.

     

    Il me semble que j’étais beaucoup plus jeune

    et qu’en mars avec les nuages j’étais suspendu dans le ciel,

    construisant les marchés sans repas de mort

     

    et les cœurs carbonisés

    avec l’avril j’étais aussi en voyage

    migrant avec les oiseaux en aval des fleuves,

     

    riais sous les bosquets

    et étais triste avec les herbes.

    Dans les chambres je voyais mourir

     

    beaucoup de ceux qui m’aimaient.

    Mais pour parler avec le vent

    je fus élu.

     

    Il me semble que j’étais beaucoup plus jeune,

    je sentais des messes de mort sauvages,

    les étoiles sauvages,

     

    les églises s’élevaient sur la mer de blé,

    toujours

    la joue de ma colline

     

    était familière de ma colère.

    Je n’étais si fatigué que là

    où sonnaient les pommes et où chantait l’hiver

     

    de mille coquillages.

    Le jour s’en allait en soupirant,

    l’année était acculée contre le mur

    noirâtre, perturbée par les angoisses de mon époque.

     

    Il me semble que j’étais beaucoup plus jeune. »

     

    Thomas Bernhard

    Sur la terre comme en enfer

    Bilingue

    Traduit de l’allemand et présenté par Suzanne Hommel

    Orphée, La Différence, 2012