samedi, 16 septembre 2017
Alain-Christophe Restrat, « ême »
Alain-Christophe Restrat & Sophie Chambard, Carcans, 1984 © CChambard
« le seul
ce qu’attente
d’ailes
et durée
quand la faim
du poème
est même
––
…de fois
la crête
le moindre mot
ô bouche cousue
––
(c’est le roman rose
jamais guéri de soi)
––
la chambre est close
la rédaction fond
la matière est d’air
comme trois moi
qui sont moi
––
on ne préface que
le cœur
comme les mots dans un livre
décevant l’attente
le blanc souci de la nuit
––
(c’est la lettre d’amour
jamais lue de toi)
––
le seul
…de fois
…de mots
le même
est
––
comme un tout
en pièces laissé
à portée de la main
––
relié à
un livre essentiel
que le peu de sens défend
––
se met à jour lentement
écrivant le feuilleton
les transitions d’une gamme
portée… table… outils
d’un travail légendaire
––
la lenteur en personne
amoureuse d’un objet :
l’étrangeté du seul
reployant les feuillets
––
et dans l’attente enfin regardée
lisant
la naturation le solde
complété d’une illusion
à décrire :
––
seul
fois
mots
ême
est-ce »
double page de l'édition originale, travail de Sophie Chambard, technique mixte sur vélin de Rives : papier de Chine & gouache.
Alain-Christophe Restrat
« ême »
coll. Les Galées, à Passage, 1985
Outre l’édition ordinaire sur vergé ivoire, 11 exemplaires ont été imprimé sur vélin de Rives, enrichis de travaux originaux de Sophie Chambard, numérotés de I à XI.
Alain-Christophe Restrat est né le 21 décembre 1946 à Beaune, dans le Loiret.
Il est mort le 14 septembre 2017.
C’était notre ami,
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mardi, 14 octobre 2014
Dominique Preschez, « Vers le soir »
À quelle heure t’ai-je écrit vers le soir ?
« Quand par la baie pulvérisée toute d’eau, une brume en tufeau de mouettes lasses resserrait l’horizon devers la Manche d’or à la colonne de ses lampes — fanal de première enfance et chapiteau de triangles ouvrant sur la maison —, encore qu’il fût tard pour me mentir l’abandon, mâchant pesamment les bœufs (blancs) aux pas cassés des guérets entretenaient un vertige de cette boucherie d’élans en halètement du soir et les moucherons, veufs aussi, mêmement voués au charme suicidaire des menthes en peine, j’ai prié la nuit de me tuer au matin, parce que sans toi j’ai peur, de la mort. »
« Pourquoi la mort, si fort ? » ai-je tracé de buée tiède encore d’une communion à l’aube des foins de fille au dos de la maison, sur une ardoise atteinte ; palimpseste et marelle pour savoir, ce qui fut de nos jeux solitaires…
Et, m’étant livré à pareille ascension, sans plus de nos magnoliers bleus près le club des sacrifices, je me suis prémuni contre ce vide de l’âtre, m’évitant un crime, où tu vis Mallarmé paraître lent, un peu, au long d’une échelle dressée qui me fit préférer l’écriture à l’astre sans homme. Tapi au recoin d’un corps de pierre à l’odeur de maman, où bombille l’essaim d’insectes qui piquent, j’ai imploré, quel diable de première famille ? pour tout en vie, me mourir…
« T’entendrai-je frapper à la porte de cuir ? » Dans la chambre malade depuis que tu n’es plus, à la mesure des vins — sexe ballant, remugle de linceul —, je répugne au pacte de l’amour perdu.
Et seul un homme seul s’habille vers le soir pour aller sur la route…
Dominique Preschez
Vers le soir
à Passage, coll. « Les Galées », 1983
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dimanche, 14 juillet 2013
Mathieu Bénézet, "Résumant ma tristesse" — 7 février 1946 - 12 juillet 2013
« n’y pense pas cette morte baisers
petites bras
douleur disaient tes mots tu n’écris
pas tout le monde a
des accidents aujourd’hui il y a
une mère
dans toute parole et enfant
n’y pense pas ne dis
pas j’ai quitté d’habiter
et pour le cœur
c’était nous
cette année vous mourrez de froid
cendres,
cendres cette légèreté du cœur
c’est un rêve d’un autre hiver où je crus
dormir et je pleurais, va
séparer fut léger — tendre
neige tendre (et je pleurais)
ce rêve où tu pleuras (et je dormais)
va,
ce fut un rêve noir hiver
résumant ma tristesse
noir poème tel qu’on peut rencontrer
des tombes qui veux me blesser d’écrire »
Mathieu Bénézet
Résumant ma tristesse
avec quatre sérigraphies en deux noirs de Raquel
4 exemplaires sur Japon nacré, 40 exemplaires sur vélin de Rives
à Passage, 1981
repris in Le Travail d’amour, Flammarion, 1984
12:04 Publié dans Écrivains | Lien permanent | Tags : mathieu bénézet, raquel, résumant ma tristesse, à passage, flammarion
dimanche, 29 janvier 2012
Bernard Vargaftig, Nancy 24 janvier 1934 — Avignon 27 janvier 2012 & l'éternité
Bernard Vargaftig
Le lieu exact — ou la peinture de colette deblé
Vivantes
Les orties ô même l’orage
Et l’absence
Et les galets vont si vite
Même l’enfance
Tout-à-coup et la cour
Plus terrible où le mur craque
Et le gouffre
Et les arbres
Qui dévalent jusqu’au vent
Comme jamais
Regardaient le langage
………………………………………
Tant de fois
Les roches le lieu exact
La prairie et
Quand il manque une page
Tomber tomber
Était comme un murmure
Et le vent se précipite
Et l’espace
Loin derrière
Effaçant pente et parfum
Immensité
Que l’horizon saisit
………………………………………
Ah plus d’oubli
Et l’instant qui commence
Un récif
Que tout aurait fait bouger
Vent et lumière
La plage dénouée
Un murmure et si lointaine
L’étendue
Où sans cesse
Avalanche dans le sens
Le rosier comme
Mortellement échappe
[…]
les trois premières pages de
Le lieu exact
ou la peinture de colette deblé
imprimé au plomb
en Garamond corps 10
en mars 1986 par mes soins
à 15 exemplaires sur
Gravure du Moulin de Larroque
enrichis d’une peinture de Colette Deblé
& à 300 exemplaires sur vélin blanc
à Passage, Bordeaux
isbn : 2.905391.11.5
14:11 Publié dans Écrivains, Édition | Lien permanent | Tags : bernard vargaftig, colette deblé, à passage