jeudi, 16 juillet 2020
Xiao Gang, « Poème sur des noms de simples »
Paysage, Dynastie des Ming
« La brise matinale fait trembler les fleurs,
Le soleil du soir brille sur l’appontement.
Tout en haut d’une tour une femme esseulée
Au crépuscule pleure sur sa solitude.
La lampe éclaire le lit des plaisirs à deux,
Dans les tentures flotte le parfum du benjoin.
Elle broie un peu d’encre, écrit deux ou trois vers,
Avec de la céruse essaie de se farder.
Elle voudrait tant voir de la fleur d’hellébore
La tige volubile emplir sa chambre vide. »
Xiao Gang ne fut pas qu’un poète à l’œuvre importante, il régna les deux dernières années de sa vie et mourut assassiné. Son œuvre fut longtemps mésestimée, pourtant, entouré par un cercle de poètes, il écrivit beaucoup dans un style très orienté vers les recherches formelles.
Xiao Gang — 503-551
in « Les Six Dynasties (de la fin des Han à la fin des Sui) » — 196-618
Traduit du chinois par François Martin
In Anthologie de la poésie chinoise
Pléiade / Gallimard, 2015
15:34 Publié dans Chine, Écrivains, Édition, Je déballe ma bibliothèque, Livre, Poésie | Lien permanent | Tags : xia tong, poème sur des noms de simples, françois martin, les six dynasties, anthologie de la poésie chinoise, pléiade gallimard, brise, fleurs, crépuscule, appontement, femme seule, lit, parfum, benjoin, vers, céruse, hellébore
jeudi, 11 mai 2017
Tao Yuanming, « Le retour aux champs »
« À l’enfant que j’étais point ne plaisait le monde
Et mon cœur pour les monts était tout plein d’amour.
Mon erreur m’a jeté dans les filets du siècle
Et trente années, pas moins, se sont ainsi enfuies.
L’oiseau tenu en cage se languit de ses bois,
Le poisson du bassin rêve de son étang.
J’ai défriché un champ dans les landes du sud :
Le rustre que je suis s’en revient à la glèbe !
Je ne possède en tout que quelques dix arpents
Une étroite chaumière de huit ou neuf travées.
L’arrière est ombragé d’ormes et de grands saules,
Le devant est planté de pêchers et poiriers.
Dans un lointain diffus s’aperçoit un village
D’où montent alanguies des fumées paresseuses.
Là-bas des chiens aboient au détour des ruelles,
Les coqs lancent leur chant tout en haut des mûriers.
Mon portail et ma cour ignorent la poussière,
Je goûte un long loisir dans la chambre déserte.
Je suis bien trop longtemps resté dans une cage,
Mais je retrouve enfin toute ma liberté.
* * *
Je reviens grommelant, m’appuyant sur ma canne ;
Le chemin, très pentu, contourne les fourrés.
L’eau du ru montagnard est très pure et très claire ;
C’est tout ce qu’il me faut pour me laver les pieds.
Je vais tirer du vin, du vin nouveau, bien chaud,
Je saisis un poulet, j’appelle mes voisins.
Le soleil s’est couché et l’ombre emplit la pièce ;
Un bon feu de broussailles nous tient lieu de lampe.
Alors la joie s’en vient. Hélas, la nuit est brève
Et voici que déjà un nouveau jour se lève. »
Tao Yuanming – 365-427
Le retour aux champs
– série de cinq poèmes, ici le premier et le dernier –
in « Les Six Dynasties et les Sui »
traduit du chinois par François Martin
Anthologie de la poésie chinoise
La Pléiade, Gallimard, 2016
18:10 Publié dans Écrivains, Édition | Lien permanent | Tags : tao yuanming, le retour aux champs, françois martin, anthologie de la poésie chinoise, la pléiade, gallimard
jeudi, 03 mars 2016
Ruan Ji, « Ce que j’ai au cœur »
« Profonde était la nuit. Le sommeil me fuyait.
Je me levai, m’assis, jouai sur ma cithare.
Sur les minces rideaux se reflétait la lune.
Et un zéphyr très doux faisait frémir ma robe.
Une oie solitaire pleura dans la broussaille ;
Un oiseau en criant passa aux bois du nord.
J’ai erré çà et là. Qu’espérais-je donc voir ?
Seul un chagrin profond a tourmenté mon cœur. »
Ruan Ji (201-263, période des Trois royaumes)
Ce que j’ai au cœur est composé de 183 poèmes, celui-ci est le premier
Traduit par François Martin
In Anthologie de la poésie chinoise
La Pléiade, Gallimard, 2015
14:05 | Lien permanent | Tags : ruan ji, ce que j'ai au cœur, françois martin, pléiade, gallimard