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jeanne gatard

  • Jeanne Gatard, « L’esquif »

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    DR

     

    « La barque lieu permanent

     

    La barque, lieu perpétuel, conque des paroles, engrange, garde le passage de ceux qu’elle a passés.

    Bac de toutes les traversées, mémoire de la mémoire. Tamis, elle écope et garde le grand vermoulu, gris de bronze après les siècles de pluie, devenu vert-de-gris de l’Aurige. Le petit corps de gaulois assis fait corps avec ce gris de bronze, autant que le trop petit cavalier sur le cheval archéologique d’Athènes, hors d’échelle.

    Ce léger décalage suffit à l’émotion. Le rapport de l’homme à la barque est tel, elle qui n’arrête pas de changer de taille, de David en Goliath.

     

    Elle a des ailes d’Hermès, a pris les flèches de tous les fous. Criblée des trous des balles, c’est la barque mitraillée, devenue légère.

    Noire au départ, elle est blanche de tous les regards qui comptaient sur elle. C’est la barque restée ronde, lourde d’oubli. Elle attend ceux qui l’attendent.

     

    Barque de tous les départs, elle n’est plus à quai, a dérivé, courbe dans le gris plomb qui l’entoure. De plomb, l’eau est devenue gypse et mercure.

    Sur le mercure liquide, elle prend tous les risques, glisse, portant ses passagers.

    Les flèches blanches ne l’ont pas coulée, elles l’ont aérée.

     

    La perplexité en haute précision a pris la gifle du réel à travers le plan de mer et la multitude de ses pans écroulés.

    Là pour un certain temps, un long laps vraiment, la barque recommence sa résonance.

     

    Barque tam-tam, barque tambour, tonneau de Diogène, devenue ventriloque, elle n’est pas loin. Du fond de la conque, chacun raconte ce qu’il a vu.

     

    Barque à trois voix dont les timbres ricochent le long des rivières.

    Parfois au bord des larmes, elle inonde de compréhension.

     

    Lieu fixe, elle flotte encore, n’est pas éperdue puisqu’elle est le lieu. Lieu dans le lieu, hors limites et plus fluide, elle s’allège tant elle est concentrée et rayonne dans son ombre. »

     

    Jeanne Gatard

    L’esquif

    Dessins en couleurs de l’auteur

    Tarabuste, 2012

    http://www.laboutiquedetarabuste.com/fr/catalogue-exhaustif

    https://gatardjeanne.wixsite.com/jeanne-gatard-site

  • Jeanne Gatard, "La grande sieste"

     

    Jeanne-Gatard.jpg« La grande sieste rend le temps plus leste. Elle est au milieu, au centre du noyau, essieu immobile. Léone y entrecroise vite le fil, haridelle repliée, genoux au menton, les bras croisant le tout, sphynge au maigre séant avec une ridelle au bas du front là où les hindoues incrustent la perle.

     

    La fatigue ne prouve rien, la preuve n’existe pas, rien n’est gagné à jamais, elle le sait, mais elle tend ses périples en quête d’on ne sait quoi, en forme de lieu blanc comme si la somme se faisait après, juste un peu tard.

     

    Extravagante d’exigence la grande sieste lève le sommeil dans l’immobile, vise le cap loin au large, de l’autre côté de l’horizon, garde la ligne.

     

    Léone regarde l’air bleu. Le carré bleu est le même au dessus des captifs où qu’ils soient.

     

                        Assis sur le canot, il regarde

                       Son carré bleu en haut de la mer.

     

    Les corps sans tige dérivent sur les cartes de la mer, Léone y cherche l’amer.


    On suicide ceux dont le désir, déborde la raison, azur et gouffre, une liberté après. Après, le vertige d’absence, la liesse des autres. »

     

     

    Jeanne Gatard

    La grande sieste

    Dessins de l’auteur

    Tarabuste, 2006

     

     

    Merci à Judith.