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  • Georg Trakl, « Au bord du marais », 3 traductions

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    « Au bord du marais

    Promeneur dans le vent noir ; les roseaux secs chuchotent doucement

    Dans le calme du marécage. Au ciel gris

    Passe un vol d’oiseaux sauvages ;

    Diagonale sur les eaux sombres.

     

    Tumulte. Au fond d’une cabane délabrée,

    La pourriture aux ailes noires prend son envol ;

    Des bouleaux rabougris gémissent dans le vent.

     

    Soirée dans une auberge abandonnée ; sur le chemin du retour

    S’attarde la douce mélancolie des troupeaux qui paissent.

    Apparition nocturne : des crapauds sortent des eaux argentées.

    Traduction Henri Stierlin

    Rêve et folie & autres poèmes

    suivi d’un choix de lettres traduites par Monique Silberstein & de Crépuscule et anéantissement par Jil Silberstein

    GLM, 1956, rééd. augmentée Héros Limite, 2009

     

     

    Au bord du marécage

    Voyageur dans le vent noir ; doucement murmure le roseau mort

    Dans le silence du marécage. Dans le ciel gris

    Suit un passage d’oiseaux sauvages ;

    Diagonale au-dessus d’eaux obscures.

     

    Tumulte. Dans la hutte en ruine

    Bat de ses ailes noires la pourriture :

    Des bouleaux atrophiés soupirent au vent.

     

    Soir dans la taverne abandonnée. La douce mélancolie des troupeaux en pâture

    Imprègne le chemin du retour,

    Apparition de la nuit : des crapauds émergent d’eaux argentées.

    Traduction par Marc Petit & Jean-Claude Schneider

    Œuvres complètes

    Gallimard, 1972

     

     

    Au bord du marais

    Errant dans le vent noir ; dans le calme du marais

    Murmurent les roseaux morts. Dans le ciel gris,

    Suit un vol d’oiseaux sauvages ;

    De biais au-dessus des sombres eaux.

     

    Tumulte. Dans la hutte défaite

    S’élève sur ses ailes noires la pourriture ;

    Des bouleaux estropiés gémissent dans le vent.

     

    Soir dans la taverne abandonnée. La douce tristesse des troupeaux du pacage

    Enveloppe le chemin du retour,

    Apparition de la nuit : des crapauds surgissent des eaux argentées.

    Traduction Eugène Guillevic

    Quinze poèmes

    Illustrations d’Étienne Lodeho

    Les Cahiers d’Obsidiane, 1981

  • Meng Jiao, « Songe d’automne »

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    « Le vieillard change du matin au soir

    À osciller entre mourir et vivre.

    Assis — un peu de vin — il se repose

    Couché — mille visions le vide même.

    La vue trop faible pour voir à la porte

    L’ouïe trop fragile pour percer le vent.

    Il est comme sa propre image peinte

    Inapte à ressentir la même chose.

    Tous les élans se sont finis en larmes

    Mais il rêve une mort légère et blanche

    Loin isolé de ses amis lettrés

    Si proche des ermites des montagnes.

    Ici le vert porte le deuil en jaune

    Toute trace de vie est déjà loin.

    Mais les saisons sans cesse se chevauchent

    Mille songes bizarres se mélangent.

    Au Sud jadis — léger — devant la mer

    Au Nord — ici — pauvre — dans les rocailles.

    Vieux souvenirs partis au gré des fleuves

    La nostalgie d’un homme à son déclin

    Attaché à l’automne du Sung-shan.

    La houe ne suffit pas à le nourrir

    Les habits de feuillage sont informes

    Le tissu de poussière — irréparable.

    Qui comprendra les poèmes anciens ?

    Cachés dans les bambous démons et spectres

    Le fer tranchant transformé en dragon…

    Le lettré ambitieux a mille rêves

    Mais la misère vient d’un cœur pervers

    La poésie mène aux habits troués

    Et là — près de mourir — toujours un gosse.

    Faire de la musique — pas du bruit

    Le bruit rend sourd écarte de la Voie

    Ces mots sont un brasier au fond du cœur

    On les écrits au sommet des montagnes. »

     

    Meng Jiao, bien que plus âgé, était dans le cénacle de Han Yü (cf. le post précédent), où il avait la place de vieux sage sans aucune ambition politique.Ils ont beaucoup écrit ensemble.

     

    Meng Jiao — 751-814

    in Ombres de Chine

    « Douze poètes de la dynastie Tang (680-870) et un épilogue »

    Choix, traduction et commentaires : André Markowicz

    Inculte / Dernière marge, 2015

    https://inculte.fr/produit/ombres-de-chine/

  • Han Yü, « Ivre retenant Meng Jiao* »

    han yü,

     

    « Dès le moment où voici des années

         j’ai découvert Li Po avec Tu Fu

    J’ai toujours regretté que ces deux-là

         n’aient pas pu vivre ensemble plus longtemps

    Nous sommes nés tous deux dans le même âge

    Et nous suivons la voix qu’ils ont suivie.

     

    Toi tu n’as pas de poste tu t’en vantes

         fierté bizarre de tes cheveux blancs

    Moi je suis plus malin pourtant j’ai honte

    Vigne verte appuyée sur un grand pin.

    Baissant la tête je te rends hommage

    Puissions-nous être la main et le gant

    Mais tu ne tournes même pas la tête

    Autant vouloir faire tinter la cloche

         en la frappant avec un brin de paille.

     

    Je voudrais que mon corps soit un nuage

         et que toi tu te changes en dragon

    Moi je te poursuivrais au bout du ciel

    Et si nous nous quittons pour le moment

         c’est là que nous pourrons nous retrouver.**»

     

    * Meng Jiao est un poète, ami de Han Yü. Nous en donnerons une page très prochainement.

    ** Cette fin est une référence au poème de Li Po, Buvant seul sous la lune, dont on pourra lire, en suivant ce lien, deux traductions.

    http://www.unnecessairemalentendu.com/archive/2016/02/13/li-po-buvant-seul-sous-la-lune-5759520.html

     

    Han Yü — 768-824

    in Ombres de Chine

    « Douze poètes de la dynastie Tang (680-870) et un épilogue »

    Choix, traduction et commentaires : André Markowicz

    Inculte / Dernière marge, 2015

    https://inculte.fr/produit/ombres-de-chine