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pléiade gallimard

  • Yu Xuanji, « Adressé à Zi’an, de l’autre coté de la rivière Han »

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    Gai Qi, le Caractère poétique de Yu Xuanji (détail), 1825. Musée de la Cité interdite, Pékin

     

    « Au sud du fleuve, au nord du fleuve, regards tristes ;

    Amour et souvenirs partagés, à quoi bon chanter ?

    Les canards mandarins sur le sable dorment au chaud ;

    Les aigrettes oisives volent dans la forêt d’orangers.

    Dans la brume, chants et musiques à peine audibles ;

    Sur l’embarcadère, clair de lune aux teintes foncées.

    Tout près et pourtant si loin est celui à qui je pense ;

    D’autant que j’entends au loin le linge être frappé. »

     

    Yu Xuanji — 844-868

    in « La dynastie des Tang »

    Traduit par Florence Hu-Sterk

    Anthologie de la poésie chinoise

    Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 2015

  • Xiao Gang, « Poème sur des noms de simples »

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    Paysage, Dynastie des  Ming

     

     « La brise matinale fait trembler les fleurs,

    Le soleil du soir brille sur l’appontement.

    Tout en haut d’une tour une femme esseulée

    Au crépuscule pleure sur sa solitude.

    La lampe éclaire le lit des plaisirs à deux,

    Dans les tentures flotte le parfum du benjoin.

    Elle broie un peu d’encre, écrit deux ou trois vers,

    Avec de la céruse essaie de se farder.

    Elle voudrait tant voir de la fleur d’hellébore

    La tige volubile emplir sa chambre vide. »

     

     

    Xiao Gang ne fut pas qu’un poète à l’œuvre importante, il régna les deux dernières années de sa vie et mourut assassiné. Son œuvre fut longtemps mésestimée, pourtant, entouré par un cercle de poètes, il écrivit beaucoup dans un style très orienté vers les recherches formelles.

     

    Xiao Gang — 503-551

    in  « Les Six Dynasties (de la fin des Han à la fin des Sui) » — 196-618

    Traduit du chinois par François Martin

    In Anthologie de la poésie chinoise

    Pléiade / Gallimard, 2015

  • Jean de la Croix, « Chanson entre l’âme et l’époux 1 à 12 »

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    « I

    Épouse

    Mais où t’es-tu caché

    me laissant gémissante mon ami ?

    Après m’avoir blessée

    tel le cerf tu as fui,

    sortant j’ai crié, tu étais parti.

     

    2

    Pâtres qui monterez

    là-haut sur les collines aux bergeries,

    si par chance voyez

    qui j’aime dites-lui

    que je languis, je souffre et meurs pour lui.

     

    3

    Mes amours poursuivrai,

    j’irai par les montagnes et les rivières,

    les fleurs ne cueillerai,

    ne craindrai lions, panthères

    et passerai les forts et les frontières.

     

    4

    Demande aux créatures

    Ô forêts et taillis

    que mon ami a de sa main plantés,

    verdoyantes prairies

    de fleurs tout émaillées,

    dites si parmi vous il est passé.

     

    5

    Réponse des créatures

    Mille grâces versant,

    en hâte par ces bois il est passé

    et en les regardant

    son visage a jeté

    sur eux le vêtement de la beauté.

     

    6

    Épouse

    Ah, qui me guérira !

    Achève enfin d’entièrement t’offrir,

    ne me dépêche pas

    d’envoyés pour me dire

    ce qui ne peut répondre à mon désir.

     

    7

    Et tous ceux-là qui errent

    me vont de toi mille grâces évoquant

    et tous plus me lacèrent

    et me laisse mourante

    je ne sais quoi qu’ils vont balbutiant.

     

    8

    Mais comment vivre encore,

    âme, là où tu vis ne vivant pas,

    et faisant pour ta mort

    les traits que tu reçois

    de ce qu’en toi de l’ami tu conçois ?

     

    9

    Pourquoi l’ayant meurtri,

    n’as-tu pas soulagé le cœur blessé

    et, me l’ayant ravi,

    pourquoi l’avoir laissé

    sans emporter ce que tu as volé ?

     

    10

    Mon tourment, éteins-le

    puisqu’à l’apaiser nul ne suffira

    et que te voient mes yeux

    car tu es leur éclat

    et je ne veux les avoir que pour toi.

     

    11

    Cristalline fontaine,

    si, parmi tes visages argentés,

    tu figurais, soudaine,

    les yeux si désirés

    qui sont dans mes entrailles dessinés.

     

    12

    Ami détourne-les,

    le vol me prend

    Époux

    Colombe, reviens-moi,

    voici le cerf blessé

    qu’au tertre on aperçoit,

    qui au vent de ton vol s’aère et boit. »

     

    Jean de la Croix

    Cantique spirituel

    traduit de l’espagnol par Jacques Ancet

    in « Thérèse d’Avila, Jean de la Croix, Œuvres »

    édition de Jean Canavaggio

    Pléiade / Gallimard, 2012

  • Bao Zhao, « Retour au pays en rêve »

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    « En retenant mes pleurs, j’ai franchi les murailles,

    Mon épée bien en mains aux carrefours déserts.

    Des tourbillons sableux volent dans le ciel noir

    Et mon cœur esseulé ne pense qu’au pays.

    Retrouvant chaque soir l’oreiller solitaire,

    Je rêve qu’un instant je m’en reviens chez nous.

    Mon épouse m’attend, souriante à la fenêtre

    En déroulant la soie sur son métier chantant.

    Quel bonheur de conter notre séparation

    Avant de retrouver la couche de satin.

    Nous coupons l’orchidée, au parfum sans pareil,

    Cueillons le chrysanthème, splendeur inégalée.

    D’un coffret elle sort l’hellébore odorant,

    De sa manche elle tire des herbes fragrantes.

    Quand je suis dans mon rêve, il n’y a plus d’espace,

    Mais quand vient le réveil un fleuve nous sépare.

    En m’éveillant soudain je pousse un vain soupir ;

    Quelle détresse alors où mon âme s’envole !

    Un vaste flot laiteux s’étale à l’infini,

    Les sommets imposants s’élèvent jusqu’au ciel.

    Les vagues tour à tour s’en vont et s’en reviennent,

    Le vent et la gelée s’accroissent puis déclinent.

    Le pays où je suis, ce n’est pas mon pays.

    Hélas ! je n’ai personne à qui dire ma peine. »

     

    Bao Zhao ­– 414-466

    Les Six Dynasties ( de la fin des Han à la fin des Sui, 196-618)

    Traduit par François Martin

    in Anthologie de la poésie chinoise

    Pléiade / Gallimard, 2015

  • Chao Zhongzhi, « En route de nuit »

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    Shi T'ao, 1642-1707

     

    « Plus je vieillis, plus le désir des mérites et de la renommée s’estompe,

    Et sur ma pauvre haridelle, seul, j’emprunte la longue route.

    Dans le village isolé, des lampes qui luisent jusqu’à l’aube

    M’informent que toute la nuit quelqu’un a lu des livres. »

     

    Chao Zhongzhi (1072 - ?)

    La dynastie des Song du sud (1127-1279)

    Traduit par Stéphane Feuillas

    In Anthologie de la poésie chinoise

    Pléiade / Gallimard, 2015