samedi, 22 août 2015
Jacques Roman, « Le dit du raturé »
Jacques Roman (& une amie), Fribourg 2 août 2015
© Sophie Chambard
« L’acte de raturer grave un choix qui fait de l’écarté une réserve, un coulé au sédiment précieux, une mémoire au fond de l’œil confiant.
Le mot ultime, le plus souvent vient après la rature. Ce ne sont pas les mots qui manquent, c’est le respir là où l’on étouffe adresse perdue, le respir retrouvé dans la rature, élégante ou rageuse.
C’est taillis, fouillis, où la plume à la main se fraye une piste. Il arrive que ce combat-là soit déjà perdu avant qu’engagé, que cette rature soit d’impuissance, qu’elle ne soit que le geste infantile d’un homme incapable de raturer en sa vie, raturer le faux geste, la fausse parole, les lâches ambiguïtés, incapable d’arracher l’épine sous la peau comme le mot de travers dans la ligne. Cet homme-là n’écrit plus. Il divague, brode, spécule, rejoint la horde de ceux pour qui le verbe est pan de décor.
L’homme qui ne se confie plus à la rature, au brouillon, enjolive qui croit pouvoir faire taire la question de l’écriture. Il noircit en vain, contre elle, du papier.
Étrangement, c’est dans le geste de raturer que cette question reste vive. C’est dans ce geste qui dévoile l’empreinte de la recherche que l’écriture donne à voir sa responsabilité au-delà même de son objet. La rature nous outille en quelque sorte face à ce que nous nommons avec ce louche respect des conquérants : l’esprit. Qui oserait penser pouvoir retourner la question de l’écriture contre elle-même quand celle-ci ne se plie qu’en minant la certitude, qu’en débornant, se nourrissant de chair, le champ de la liberté. »
Jacques Roman
Le dit du raturé / Le dit du lézardé
Isabelle Sauvage, 2013
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mardi, 18 août 2015
Sergueï Essénine, « Poèmes 1910-1925 »
« Par les soirs bleus, les soirs de lune,
Autrefois, j’étais beau et jeune.
Et sans pouvoir s’arrêter tout est
Passé pour ne jamais revenir…
Yeux délavés, cœur refroidi…
Ce bonheur bleu ! Ces nuits de lune !
4 / 5 octobre 1925
*
Pauvre plumitif, est-ce bien toi qui composes
Des chansons à la lune ?
Depuis longtemps je me suis refroidi devant
Le vin, le jeu, l’amour.
Cette lune qui entre par la croisée
Verse une lumière à vous crever les yeux…
La dame de pique j’ai levé
Pour jouer enfin l’as de carreau.
4 / 5 octobre 1925
*
Au revoir mon ami, au revoir.
Mon cher, tu es tout près de mon cœur.
Cette séparation prédestinée
Promet bien une rencontre à venir.
Au revoir mon ami ; ni
Poignée de main, ni un mot,
Ne va pas t’affliger ici, –
C’est que vivre n’est pas nouveau
Et mourir, il est vrai, non plus. »
1925
(Dernier poème d’Essénine, écrit le jour de sa mort, avec son sang)
Sergueï Essénine
Poèmes 1910-1925
Traduction du russe & postface Christian Mouze
Avant-propos d’Olivier Gallon
La Barque, 2015
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mardi, 11 août 2015
Vasco Graça Moura, « L’ombre des figures & autres poèmes »
Le métier de mourir
« j’imagine ainsi la mort de pavese :
c’était une chambre d’hôtel à turin,
assurément un hôtel modeste, à une ou deux
étoiles, s’il avait des étoiles.
un lit de bois, au vernis écaillé,
grinçant de rencontres fortuites, un matelas mou et humide
avec un creux au milieu, comme toujours.
le mois d’août s’écoulait avec sa terre sombre
encrassant les rideaux, rien n’allait exploser
en ce mois d’août à cette heure de l’après-midi
à la lumière douceâtre. et quelqu’un avait mis
trois roses en plastique dans un vase vert.
je vois comment pavese est entré, il a négligemment
posé sa valise, plié quelques papiers
et enlevé sa veste (comme dans les films
italiens de l’époque), puis il est allé aux toilettes
dans le couloir, au fond, peut-être a-t-il pensé
que cette vie n’est qu’une pissée ou que.
il est revenu dans la chambre, il y avait
une âme fétide dans tout ça.
il a ouvert la fenêtre
et demandé la ligne.
la nuit tombait peu à peu sans paroles, et même sans klaxons
intempestifs, il a rempli un verre d’eau. et il a attendu.
quand le téléphone a sonné, il n’y avait pas grand chose
à dire et il avait déjà tout dit :
il avait déjà dit combien l’amour nous rend
vulnérables ; et misérables, anéantis ;
et qu’il faut de l’humilité, non de l’orgueil ;
et puis cesser d’écrire ;
que c’est ce dénuement qui nous tue.
c’était plus ou moins ça — notre condition
trop humaine, la voix humaine, la fragile
expression de tout ça, une fermeté tendue :
“et même de toutes jeunes filles l’on fait”,
elles avaient des noms obscurs et pas le moindre
remords lancinant, personne pour parler d’elles.
ce que l’on redoute le plus c’est le courage
de ce qui pourrait sembler facile : tout ce que l’on n’a pas dit,
lourd d’un seul coup de soudaines frontières.
c’était plus ou moins ça. je ne sais pas si après
il a mis sur la porte un écriteau
avec do not disturb ou quelque chose de semblable,
ni s’il a pris les cachets un à un ni s’il les a comptés.
je ne sais pas si c’est une servante qui l’a trouvé,
si la police est venue aussitôt, s’il a laissé une lettre
à son meilleur ami, s’il a éteint la lumière,
s’il a posé près de lui son portefeuille, sa montre, son stylo.
je ne sais pas s’il est entré dans la mort en homme qui a
des images insupportables dans la tête,
des mots martelés du désir, ou en homme qui se tient froidement
de l’autre côté du sommeil, et va se taire, et a raison.
je ne sais pas si ça s’est passé de la sorte, s’il existe une autre
vérité imaginable ou interdite, mais je sais qu’il avait
un regard décidé, une instigatrice, et quarante-deux ans.
et je sais qu’à cet âge il n’est plus guère de vérités
et nulle dimension biographique dans la mort.
c’est déjà dans les écritures. je préfère
dire qu’il a fermé la porte à clef
et je sais qu’il était viril dans sa transparence. »
Vasco Graça Moura
L’ombre des figures & autres poèmes
Traduit du portugais par Michelle Giudicelli
Préface de Marc Blanchet
L’Escampette, 1997, rééd. 2002
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dimanche, 02 août 2015
Christian Garcin, « Vétilles »
Poitiers, mai 2013 – 20 ans de L'Escampette – © Sophie Chambard
« Ce qui manque à la plupart des écrivains qui m’ennuient ou m’indiffèrent, c’est le sentiment de la nature – l’appréhension directe, physique, de la nature dans sa sauvagerie, son altérité, sa puissante étrangeté. Pas en tant que cadre strict du récit (cela importe peu), mais en tant qu’ombre portée sur leur imaginaire, et créant un halo, une épaisseur, une espèce de densité dont leurs mots se trouvent dépourvus.
*
La vieillesse. Le temps qui file. Je vois ma mère ou C. par exemple, et me dis qu’un jour il va falloir s’occuper, en plein chagrin, de sordides affaires de succession, de meubles et d’objets à caser ici ou là. Mais je me vois moi aussi en train de vieillir, parfois j’ai l’impression d’être mon grand-père, je suis un vieillard, mon corps s’affaisse, se ramollit, je ne fais rien pour lutter contre cela. D’autres fois je me sens proche de l’âge de Clément, je sors à peine de l’adolescence, il faut croire que je ne sais plus très bien où j’en suis. Mais de plus en plus je ne peux m’empêcher de vivre le présent comme s’il s’agissait d’un passé, comme si je le voyais depuis un futur non précisé, comme si j’en portais déjà la nostalgie. C’est ce même mouvement, mais inverse, qui fait que je vois parfois mon passé comme si j’y étais à présent, comme si je pouvais aujourd’hui m’y projeter et l’éclairer de ce qui par la suite s’est déroulé. »
Christian Garcin
Vétilles
L’Escampette, 2015
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dimanche, 12 juillet 2015
Emmanuèle Jawad, « Plans d’ensemble »
« il est une fois, une amorce d’histoire dans une suite d’entames,
dans le préambule, le récit épuise les possibilités de séjour,
la résolution des fractures, une abrogation des ruptures,
le territoire dissout ses marques, l’absorption partielle des traces,
la suggestion d’un mur à l’endroit d’une ligne discontinue des fragments
une marche sur un territoire, une organisation informelle couvre
un temps vacant, un rythme peu soutenu, l’ouverture de temps morts,
il remet au jour suivant la photographie de la veille, Anna dans l’embrasure
des portes, un espace – temps mental affleure à chacun des seuils,
le basculement de poignées sur des pièces vides
il dresse les cartes qu’il replace dans des répertoires historiques,
les tentatives d’un franchissement, une litanie,
en place, une éclosion de plaques commémoratives sur le tracé »
Emmanuèle Jawad
Plans d’ensemble
Propos2 éditions, 2015
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mercredi, 08 juillet 2015
François Jacqmin, « Prologue au silence »
« Commencer,
c’est-à-dire,
s’écarter du sujet.
*
Il faut cueillir modérément :
Une pensée de trop,
et le bouquet
vous arrache des larmes.
*
Mon effort
consiste à maintenir intacte
la sensation de l’inexplicable,
comme un équilibre
durement conquis. »
François Jacqmin
Prologue au silence
Coll. Clepsydre, La Différence, 2010
Merci à Lambert Schlechter qui ce matin, à Wellenstein, m'a fait découvrir cet auteur & ce livre essentiels.
13:01 Publié dans Écrivains, Édition | Lien permanent | Tags : françois jacqmin, prologue au silence, la différence
vendredi, 26 juin 2015
Lambert Schlechter, « La théorie de l’univers »
« XXXV
la vie est venue et avait tes yeux
j’écrivais ces mots, j’étais si heureux
c’est le jour où le voisin est venu
avec la scie pour couper la glycine
c’est un énergumène hébété
tout bossu d’âme et tout manchot de cœur
c’est une mauvaise herbe qu’on arrache
et qui se décompose à vue d’œil
voici la cascade des métaphores
la chute la culbute le naufrage
CXII
l’Aimée qui ne veut plus être amante
et l’amante qui veut être aimée
c’est une histoire cassée, j’en ramasse
les débris, sans pouvoir les recoller
désir, curiosité — même geste
ouvrir le livre comme ouvrir la femme
grammaticalement ce qu’on appelle
le futur posthume : tu m’auras aimé
un jour d’été sans que je m’y attende
j’ai reçu un avis de désamour »
Lambert Schlechter
La théorie de l’univers, distiques décasyllabiques
Éditions Phi, 2015
19:54 Publié dans Écrivains, Édition | Lien permanent | Tags : lambert schlechter, lathéorie de l'univers, phi
samedi, 20 juin 2015
Caroline Sagot Duvauroux, « ’j »
« Les anémones bleues délivrent des bourdons noirs. On est parti du cœur. Y retourne-t-on ? Aider quelqu’un aiderait. On s’est trahi pour ramasser une forme, on a trahi la course, ravi. C’est l’amour qui accomplit la beauté. Au cœur. On vit tout ce qui fut vécu par d’autres. On se nomme encore quelle bizarrerie. On ne sait plus lire. On voudrait dire je ne sais plus lire mais d’où vient que je puisse l’écrire. On est trop vieux des yeux, des yeux à la pensée, trop vieux. Les anémones bleues s’installent dans les yeux. On pense. Ça ne concerne pas les yeux.
Rejoindra-t-on le cœur ?
Le cœur tout noir est un bourdon. Très doux. On voudrait dire je le délivre, regarde. Oui, regarde on voudrait dire mais on ne dit rien à cause du maître chien. Alors sèchent des amours tout autour d’ici là. Là c’est un bulbe, sûr, mais combien de temps faut-il considérer les fanes, ici ? D’ici là s’emplit de faneries qu’en fera-t-on. Plier, déplier, tapisser, le ciel, un bout, un mouchoir touche au fond du puits, touche le fond par rien entre, on voit le nandina sur le bord. Joli feuillage. On entend qu’un souffre à l’épaule et puis qu’il meurt. On ne va pas parler de ça qui n’aide pas. Une peinture légère aiderait. Qui vous a posé sur le monde avec cette pensée compliquée, le rire si facile ? On ment c’est constitutif on ne peut tout de même pas avouer parce que l’aveu n’importe pas, l’aveu si, mais la chose à avouer pas du tout. »
Caroline Sagot Duvauroux
‘j
Unes, 2015
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jeudi, 18 juin 2015
Jean-Paul Klée, « Manoir des mélancolies »
Lac gelé
« Corps déjà vieux mal aimé de moi comme s’il avait peu de réalité car si mal vécu par la famille je ne me suis jamais opposé ni donc entièrement construit : j’étais posé là comme abandonné repoussé nul ne m’a remarqué remué parfumé ni entrepris travaillé entouré REMORQUÉ amélioré encouragé. Grandi tout seul j’ai poussé mon raciné vers le fond de moi & sans l’atteindre jamais j’ai renoncé m’étendre largement socialement car c’est le Vertical qui m’a mobilisé oui le réseau du sociétal ne me plaisait qu’à moitié je l’ai tenu loin de moi Comme si j’étais jamais sorti tout à fée d’une bulle de savon qu’à dix douze ans je me fis car la vie hors d’elle ne se concevait pas. Cette bulle me protégea des coups & du vilain climat où nous végétions rue des Sœurs jusqu’à 1963 Et depuis lors je n’ai pas quitté cet abri-là il est devenu quasi ma deuxième peau Je survis là-dedans & cet inconfort étonnant m’a fait produire cinq ou sept mille feuillets !… Ah si le lac gelé un jour fondait sous mes pieds Si la marquise glacée s’en allait de moi dans quel trou noir je tomberais ?… l’enfer ou paradis ?… »
Jean-Paul Klée
Manoir des mélancolies
Andersen, 2014
18:55 Publié dans Écrivains, Édition | Lien permanent | Tags : jean-paul klée, manoir des mélancolies, andersen
lundi, 15 juin 2015
Jean-Pierre Chambon, « Tout venant »
« Quel délicieux petit plaisir
de retenir
dans la zone floue
où n’ont pas encore
pris corps les mots
le moment d’écrire
* * *
Écrire
non tant pour éclaircir
que pour creuser encore
dans l’obscur
où les mots enfoncent leurs racines
* * *
Cette ombre de fumée
qui en rapides volutes ondule
sur la blancheur du mur
est-ce pensée des morts
cette chaine immatérielle
dont le vent disjoint
les anneaux silencieux
* * *
Les mots
dans leur ombre insensée persiste
portant l’écho d’une voix à venir
le rêve d’une langue transparente
tenue en réserve depuis l’enfance
qui nous ferait traverser le miroir
et dirait enfin le secret des choses
* * *
Le vieux cerisier au fond du jardin
a atteint aujourd’hui même
le degré extrême de la blancheur
attestant à nouveau l’oracle
énoncé par l’ermite zen Ryôkan
le monde
est devenu
un cerisier en fleurs »
Jean-Pierre Chambon
Tout venant
Héros-limite, 2014
20:10 Publié dans Écrivains, Édition | Lien permanent | Tags : jean-pierre chambon, tout venant, héros-limite
mardi, 02 juin 2015
Sandra Moussempès, « Sunny girls »
© Didier Pruvot
« Cela faisait trois nuits que je faisais le même cauchemar, maintenant même les poètes français parlent de forêts, je sais que c’est l’arbre qui cache la forêt que ce poème ne parlera pas de mes trois cauchemars, on ne parle pas de qui a détruit un sommeil paisible, parfois j’aime aussi lire des poètes qui n’ont rien à subir, rien à éprouver, rien à rejeter, leurs mots se détachent sur la neutralité comme une actrice se doit d’être transparente, une blancheur de la construction qui ne cache rien d’inquiétant on sait seulement qu’on est dans le sixième arrondissement, dans un appartement immense et blanc et que quelques personnes semblent se connaître. »
Sandra Moussempès
Sunny girls
Poésie/Flammarion, 2015
13:09 Publié dans Écrivains, Édition | Lien permanent | Tags : sandra moussempès, sunny girls, poésieflammarion
samedi, 23 mai 2015
Michel Chaillou, « Journal »
« Mardi 8 décembre 98
Toujours à la recherche du livre, toujours les mêmes difficultés. J’ai inventé le principe de nonchalance romanesque. Ne pas commencer immédiatement dans une histoire, mais s’en approcher en contant mes humeurs, mes projets. L’approche de l’histoire étant aussi importante que l’histoire, qu’on quitte parfois, qu’on reprend. Dans la clarté des vitres, c’est quelque chose qu’on lit à travers les fenêtres, leur transparence. Voici un début possible :
“Des amis m’avaient dit : « Si tu viens par ici, n’hésite pas à nous appeler. On te recevra avec plaisir. » J’hésitai, la Bretagne m’intimide, particulièrement sa partie nord à l’ouest de Roscoff, devant quoi la Manche elle-même se saborde. Ils insistaient : « Après tout ce n’est pas un si grand détour, toi qui les aimes. » C’est vrai, je ne suis que détours et chemins de rencontre, néanmoins d’avoir au bout du fil en arrière-plan et sans crier gare cette côte des Légendes a de quoi couper le souffle, etc. Je balbutiai que peut-être en effet. Sait-on jamais où l’été vous mène et je m’étais justement réservé quelques jours…”
La nuit tombe, je réfléchis. Parviendrais-je un jour à vraiment romancer cette aventure ? Tout me paraît difficile, le moindre mot que j’inscris sur la page. Et on me croit un écrivain inventif. Renée à Cochin semble aller mieux. Tout à l’heure j’irai attendre Michèle gare des Antipodes*. Je suis le jouet de plusieurs désirs. Un autre début :
“Moi, Jeanne Jeune Andersen, j’aimerais conter du moins au papier ce qui m’arriva. J’ai bientôt de l’âge, soixante en réalité. On me dit encore belle, mais mon nez s’accentue et cette bouche naguère pleine de pourparlers…”
Mercredi 9 décembre 98
Certains ne comprennent pas que s’approcher d’une histoire est presque plus important. Eux s’engagent tout de suite dedans, moi, pour la Clarté je me défends tout de suite d’y tomber. Il y a là tout un art à inventer, ruses et proximités, lointains et artifices. Temps froid, humide. Il est 13h15. »
Michel Chaillou
Journal (1987-2012)
Préface de Jean Védrines
Fayard, 2015
* Surnom donné par Michel Chaillou à la station Boulainvilliers, sur la ligne C du RER, que son épouse empruntait quotidiennement.
12:46 Publié dans Écrivains, Édition | Lien permanent | Tags : michel chaillou, journal, jean védrines, fayard